Élevage 14 mai 2019

Un défi de taille pour les petits éleveurs

Pour les producteurs de volailles à petite échelle, l’accès à un abattoir s’avère souvent un problème de taille. Une réalité qui freine le développement de ce mode alternatif de production.

Producteur maraîcher depuis près d’une quinzaine d’années, Antoine Gendreau-Turmel connaît bien cette problématique, puisqu’il élève une centaine de poulets de chair pour varier le contenu de ses paniers biologiques. « C’est un sideline pour faire plaisir à nos clients », raconte le propriétaire de la Ferme de la Coulée douce, à Saint-Antoine-de-Tilly.

L’agriculteur avait l’habitude de faire abattre ses poulets chez Agri-Bio, de Saint-Agapit, « deux villages à côté ». D’aussi loin qu’il se souvienne, l’usine offrait, plusieurs fois par mois, des journées complètes réservées aux petits éleveurs. En 2013, l’achat d’Agri-Bio par Exceldor a changé la donne, note M. Gendreau-Turmel. Les fenêtres d’abattage ont rétréci comme peau de chagrin pour atteindre deux jours dans toute l’année, précise-t-il. La coopérative confirme que pour 2019, seulement deux journées d’abattage seront offertes aux petits éleveurs, et ce, en juillet. « Cependant, le nombre de journées peut varier d’une année à l’autre, indique la conseillère principale aux communications et aux relations publiques, Gabrielle Fallu. Certains de nos clients réguliers ont connu de la croissance et nous avons dû les prioriser, ce qui par conséquent nous amène à avoir moins de disponibilité pour cette clientèle. » Exceldor dit avoir référé ces éleveurs vers l’abattoir Pouliot de Saint-Henri de Lévis.

Antoine Gendreau-Turmel dénonce aussi les pénalités que doivent débourser les aviculteurs à temps partiel pour leurs lots de moins de 50 oiseaux. Les clients sont informés dès la prise de rendez-vous que l’usine exige une quantité minimale de 50 poulets, se défend Exceldor. Pour les lots de taille inférieure, des frais de 50 $ sont réclamés.

« C’est dommage pour la production alternative à plus petite échelle. Il y a une demande pour ce produit-là, mais on ne pourra pas développer ce secteur », estime M. Gendreau-Turmel. Lui-même se demande si ça vaut la peine de continuer son élevage. « Jadis, nous produisions une centaine de poulets, deux fois par année. Nous avons coupé la production de moitié », ajoute l’agriculteur.

À la Fédération de producteurs des races patrimoniales du Québec, André Auclair constate la même problématique d’accès aux abattoirs pour les éleveurs de poulets fermiers Chantecler, qui ont de petits lots à faire transformer. Dans le cas du cahier de charges de la volaille Chantecler, les carcasses doivent être refroidies à l’air et non à l’eau, ce qui restreint davantage la liste des usines pouvant les transformer.

Rareté

Agri-Bio constitue l’un des rares abattoirs sous inspection fédérale spécialisés dans l’abattage à forfait de volailles au Québec. Dans toute la province, 13 usines détiennent un permis fédéral d’abattage de volaille, mais la plupart n’offrent pas de services d’abattage à forfait. Quant aux établissements sous inspection provinciale, le ministère de l’Agriculture du Québec (MAPAQ) en recense sept pouvant transformer de la volaille.