Élevage 28 juin 2022

Les services d’insémination du CIAQ réduits dans certaines régions

Dans un contexte de frais d’exploitation élevés et de main-d’œuvre limitée, le Centre d’insémination artificielle du Québec (CIAQ) cesse dès cette année le service d’insémination dans la Vallée-de-la-Gatineau en Outaouais et dans Charlevoix, où la concentration d’animaux à saillir n’est pas suffisante pour rentabiliser les longs déplacements des employés payés à l’acte. En revanche, l’organisation propose le soutien nécessaire pour que les producteurs accomplissent la tâche eux-mêmes.

Johanne Chartier
Johanne Chartier

« Avant d’en arriver là, on discute avec les producteurs. On cherche des solutions », précise d’emblée la nouvelle directrice générale du CIAQ, Johanne Chartier, dans une entrevue accordée à La Terre. Elle insiste sur le fait qu’il s’agit d’une décision de dernier recours, dont les agriculteurs concernés ont été prévenus il y a longtemps.

Apprentissage à la ferme

Comme option de rechange, 11 fermes ont choisi d’essayer le pistolet EyeBreed, une nouvelle technologie venue de France et dont le CIAQ est distributeur. L’outil vise à faciliter l’apprentissage des producteurs qui souhaitent dorénavant inséminer leurs animaux eux-mêmes. Des formations leur permettant d’en comprendre l’utilisation ont été déployées récemment.

Une productrice de Baie-Saint-Paul, Julie Bouchard, qui offre des
services-conseils pour le CIAQ, précise que des images captées par caméra sont projetées sur le téléphone intelligent par l’entremise d’une application. L’outil permet de bien voir l’entrée du col et de savoir avec précision où entrer la paillette pour poser la semence.
« Je trouve que c’est facilitant pour les gens qui ont de la misère avec l’axe d’insémination. La méthode conventionnelle, c’est beaucoup d’étapes et ça se fait un peu à l’aveugle », détaille l’inséminatrice qui a appris à se servir de la technologie et qui aide ses confrères dans leur apprentissage à la ferme.

Serge Gilbert, producteur à Saint-Hilarion dans Charlevoix, a qualifié le processus de « pas si pire ». « Pour les débutants, c’est moins dur que le conventionnel. On vient d’inséminer avec ça, mais on n’a pas eu les résultats. On va attendre de voir si ça a collé ou pas », a-t-il indiqué à la fin mai. De son côté, Samuel Aumond, de Maniwaki en Outaouais, s’est dit « très enchanté » de sa première expérience. « Une nouvelle technologie, c’est toujours une crainte, mais plus ça va aller et plus ça va être facile. »


Une cinquantaine de fermes laitières non desservies

Le service traditionnel d’insémination du Centre d’insémination artificielle du Québec (CIAQ) avait déjà été retiré en Gaspésie il y a quelques années, puis à l’Île-d’Orléans. Avec la Vallée-de-la-Gatineau et Charlevoix qui s’ajoutent, ce sont désormais une cinquantaine de fermes laitières qui ne sont plus desservies. Selon les territoires, les producteurs concernés ont le choix de payer plus cher pour continuer de recevoir le service ou de suivre des formations pour procéder eux-mêmes à l’insémination, à l’aide du pistolet EyeBreed ou non.
Marc-André
Godin, producteur laitier de Saint-Eustache dans les Laurentides, indique ne pas être « trop touché encore », mais remarque des hausses de frais de services et craint d’autres coupures à venir. « On pense à faire l’insémination nous-mêmes. Beaucoup de producteurs le font, mais c’est du temps et ce n’est pas nécessairement tout le monde qui arrive à apprendre », souligne-t-il.

Johanne Chartier s’est voulue rassurante. « Quand on a des concentrations de fermes et la main-d’œuvre, on va toujours offrir le service. Nos employés, on veut les garder », dit-elle.

Consciente des défis à venir dans un contexte inflationniste où la compétition est féroce, la directrice générale en poste depuis le 11 mars se fixe pour objectif que le CIAQ demeure
« numéro un au Québec » et que la fierté des producteurs envers l’organisation soit préservée. « On va avoir 75 ans l’an prochain. Le centre a été construit par les producteurs et pour les producteurs. […] Notre mission, c’est encore de travailler et de collaborer avec les producteurs », dit-elle.