Élevage 29 août 2014

Des millions de porcs liquidés

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Avec la hausse du prix des grains, des éleveurs jettent l’éponge partout sur la planète.

Le phénomène sévit particulièrement aux États-Unis, où les estimations les plus récentes du département de l’Agriculture (USDA) révisent à la baisse les volumes de porcs mis en marché pour 2012. Baisse qui devrait se poursuivre en 2013. Pour l’USDA, il est clair que la réduction découle de la hausse du coût des grains, liée à la sécheresse qui perdure depuis des mois. De plus, la chaleur affecte directement les porcs, qui la supportent très mal.

Les analystes de Rabobank, l’une des plus importantes banques du monde, en rajoutent. Dans un rapport sur l’état de l’industrie porcine au troisième trimestre de 2012, ils indiquent noir sur blanc que le boom rapide des coûts d’alimentation vient de déclencher une liquidation du cheptel reproducteur. En augmentant l’offre de viande, cette réforme de truies tire le prix – et la rentabilité des élevages – vers le bas. Les chiffres chez nos voisins du Sud donnent raison à Rabobank. En juillet, les abattages de truies ont bondi de 5 % par rapport à l’an dernier. Cette affluence d’animaux a fait fléchir le prix de 33 % en une seule semaine. Du côté de l’Union européenne, la liquidation des troupeaux est aussi bien amorcée, et les analystes prévoient qu’elle atteindra 3,2 % en 2012.

Le ralentissement de la production porcine devrait s’étirer jusqu’en 2013, estiment les experts de Rabobank. Ceux-ci croient néanmoins que le repli insufflera un peu de vigueur aux prix. Quant à savoir si cela sera suffisant pour contrecarrer la hausse des coûts d’alimentation, le mystère demeure entier.

Québec n’est pas épargné

Le Québec n’échappe pas à la tendance. Ainsi, en juillet, les abattages accusaient un retard de 7,7 % par rapport à 2011, selon les données compilées par la Fédération des producteurs de porcs du Québec et le Centre de développement du porc du Québec. Il s’agit de la plus maigre récolte pour un mois de juillet au cours des 12 dernières années. Bien que la sécheresse ait contribué au ralentissement de la production, « la principale cause […] est probablement plus structurelle, soit une baisse de production, au Québec, reliée à la disparition d’entreprises », résume l’agroéconomiste Caroline Lacroix dans le bulletin Échoporc.

La faute au maïs

Plusieurs analystes pointent du doigt la course folle du cours du maïs pour expliquer la déroute de l’industrie porcine. Depuis la mi-juin, les contrats à terme du maïs se sont ainsi majorés de 60 %, alors que ceux du porc ont fléchi de 17 %, précise Mme Lacroix. Dans le plus récent rapport de l’USDA sur l’offre et la demande mondiales de denrées agricoles (WASDE), les estimations de prix moyen pour 2012-2013 passent de 6 $/boisseau à plus de 8 $/boisseau.

À l’opposé, l’USDA abaisse une fois de plus les rendements anticipés du maïs. Ceux-ci chutent de 146 à 123 boisseaux/acre (7,75 tonnes/hectare), les plus faibles en 17 ans! Pour ce qui est de la récolte, les prévisions reculent de 13,0 à 10,8 milliards de boisseaux (274 millions de tonnes), soit les résultats les plus maigres depuis 2006. Les éleveurs se tournent maintenant vers la seconde moitié de 2013 où une fenêtre alliant prix à la hausse et coûts d’alimentation en baisse semble se dessiner.