Élevage 24 octobre 2016

Des sangliers sauvages menacent le Centre-du-Québec

« Il y a quatre ans, on en voyait deux ou trois. Aujourd’hui, c’est une douzaine de sangliers sauvages qui font des ravages ici, peste Henri Christeller, producteur laitier établi près de Victoriaville. Ils ont complètement détruit un champ de 2 ha. » Un voisin en aurait aperçu une quarantaine, rapporte l’agriculteur.

« C’est extrêmement impressionnant ce qu’elles peuvent causer comme dommages, ces bêtes-là. J’ai essayé de passer en tracteur dans la zone qu’elles avaient détruite et c’était impraticable; je sautais hors de mon siège », mentionne M. Christeller.

Un producteur importuné par la présence de sangliers sauvages fait mention de tranchées qui détruisent même ses chemins de ferme. Plus loin, un autre agriculteur a constaté des dommages dans ses cultures de maïs.

« Au début, les sangliers creusent peu profondément dans le champ à la recherche de vers ou de larves, mais plus tard en été, ce sont littéralement des tranchées qu’ils font », raconte l’agriculteur Henri Christeller. Crédit Photo : Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs
« Au début, les sangliers creusent peu profondément dans le champ à la recherche de vers ou de larves, mais plus tard en été, ce sont littéralement des tranchées qu’ils font », raconte l’agriculteur Henri Christeller.
Crédit Photo : Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs

Prévenir les évasions

Une éleveuse de sangliers confirme que ces bêtes possèdent un immense pouvoir destructeur. « Les sangliers ont un odorat exceptionnel qui leur permet de sentir jusqu’à 15 cm dans le sol. Alors ils ravagent tout! J’ai aménagé un grand enclos dans une culture de millet et après trois semaines, les sangliers avaient tout mangé, même les racines », témoigne Lise Chartier, de la Ferme lait sangliers des bois. Consciente de l’impact que peut avoir l’évasion de sangliers, elle fait systématiquement castrer tous ses mâles non reproducteurs. « Ici, nous n’avons jamais eu d’évasion en 27 ans, mais je sais que c’est arrivé ailleurs au Québec. Un sanglier, ce n’est pas un cochon. Ça saute haut, c’est très intelligent et c’est gros », fait-elle remarquer. Un mâle peut atteindre 600 lb et une femelle 250 lb.

Henri Christeller connaît l’histoire derrière le groupe de sangliers qui endommage ses champs. « Je ne veux pas critiquer le monsieur, lance-t-il. C’était un éleveur près d’ici. Pendant qu’il tentait de charger les sangliers dans un camion, trois bêtes en ont profité pour sauter et s’échapper. On pensait que l’hiver allait les tuer, mais non. »

Jusqu’à cette année, les producteurs avaient le droit d’abattre à vue ces fugitifs et leurs descendants. Cette politique a changé, au grand désespoir de M. Christeller et de quelques voisins. « Le gouvernement préfère attendre. Il veut les compter et les mettre en cage. Mais si on attend trop, la situation deviendra incontrôlable. Je vous garantis que le printemps prochain, ils seront encore plus nombreux. L’interdiction de les abattre, ce n’est pas sérieux », juge-t-il.

Le ministère emboîte le pas

La biologiste au ministère de la Faune Édith Cadieux souligne que des mesures ont été prises afin de localiser et d’inventorier les sangliers sauvages. Une estimation très sommaire fait état d’une population totale sous la centaine d’individus, concentrée au Centre-du-Québec.

Le ministère a demandé conseil auprès de spécialistes de l’État de New York, qui travaillent eux aussi à éradiquer leurs populations de sangliers sauvages. « Nous projetons de récupérer entièrement le groupe de sangliers sauvages présent au Centre-du-Québec. Pour l’instant, nous envisageons l’utilisation de cages géantes, comme dans l’État de New York », révèle Mme Cadieux.

Comme ce sont des animaux rusés, certains d’entre eux peuvent éviter le piège si la technique n’est pas au point. Le ministère doit donc bien paramétrer les habitudes de la horde. La collaboration de tous les gens impliqués, y compris les agriculteurs, est primordiale. « Il ne faut pas paniquer », conclut la biologiste.