Actualités 4 avril 2017

Les nouveaux visages de l’aquaponie commerciale

Pendant 12 ans, l’aquaponie commerciale au Québec a été incarnée par un seul joueur, mais voilà que de jeunes entrepreneurs lorgnent cette avenue eux aussi.

Il y a d’abord ÉAU (Écosystèmes alimentaires urbains), dont la ferme verticale en démonstration près du marché Jean-Talon, à Montréal, a éveillé la curiosité du grand public l’été dernier. Les conteneurs ont depuis été transportés à l’Université Laval pour en perfectionner l’isolation dans le but de desservir les communautés du nord.

Une ferme verticale aquaponique a été aménagée dans des conteneurs par ÉAU l’été dernier. Crédit photo : Caroline Dostie
Une ferme verticale aquaponique a été aménagée dans des conteneurs par ÉAU l’été dernier. Crédit photo : Caroline Dostie

La jeune entreprise offre également son expertise pour transformer d’anciens bâtiments de plus grande taille en fermes aquaponiques. Un premier projet commercial devrait être lancé d’ici 2018. « L’aquaponie présente beaucoup d’avantages, explique la cofondatrice d’ÉAU, Émilie Nollet. On peut la pratiquer à l’intérieur, 12 mois par année, et c’est écologique parce qu’on utilise environ 80 % moins d’eau qu’avec l’agriculture conventionnelle. On n’emploie pas non plus de pesticides ou d’engrais nocifs. » Comme ce ne sont pas toutes les cultures qui s’y prêtent, elle insiste sur le caractère complémentaire de cette production.

Une autre initiative aquaponique nommée Serres·Toi s’apprête à prendre son envol. Les instigateurs Sébastien Perreault et Alexandre Thibault projettent la construction de 16 000 pieds carrés de serres à Varennes au cours de l’été. Leur site Web annonce la production de fines herbes et de truites arc-en-ciel dès l’automne. « On a pris notre modèle au Texas, raconte M. Perreault. C’est une ferme qui produit le même volume et le même type de production que ce qu’on veut faire. Le design de leurs serres est aussi axé sur une vocation éducative, ce qui nous a séduits. »

Pas si facile

Le pionnier de l’aquaponie au Québec, Marc Laberge, a commencé en 2004 à cultiver des laitues Boston au-dessus d’un bassin de truites arc-en-ciel à Sainte-Agathe-des-Monts, dans les Laurentides. « La réalité, c’est que ce n’est pas si facile, contrairement à ce que le monde pense », affirme le biologiste.

Aussi convaincu soit-il des vertus de l’aquaponie, M. Laberge se montre peu optimiste pour les nouveaux joueurs qui envisagent de se lancer dans une production commerciale. « Beaucoup apparaissent, mais combien vont durer? » se demande-t-il. Parmi les obstacles à prévoir, il cite entre autres les marchés sans pitié et la difficulté de faire reconnaître les produits comme étant biologiques.

Selon Vincent Leblanc, le fondateur de l’entreprise Violon et Champignon, qui mise notamment sur l’aquaponie pour promouvoir l’alimentation locale, un autre obstacle à une production commerciale est la nourriture des poissons, qui n’est pas adaptée. « Ailleurs dans le monde, ils commencent à créer des moulées pour que les éléments en carence, comme le calcium et le magnésium, se retrouvent dans les déjections des poissons », mentionne celui qui organise d’ailleurs une formation sur l’aquaponie à la fin d’avril.

Il y a quelques années, Marc Laberge a décidé de vendre son entreprise tout en restant impliqué dans le développement d’une autre installation aquaponique encore plus vaste à Mirabel. Le nouveau propriétaire, Louis Chapdelaine, a mentionné à la Terre qu’il espérait pouvoir inaugurer les Serres Serena à l’automne. M. Laberge, lui, travaille désormais comme consultant pour des mégaprojets dans l’Ouest canadien, où l’aquaponie lui semble mieux acceptée.

Dans le système fermé qu’est l’aquaponie, chacune des composantes rend service à l’autre. Les poissons produisent des excréments que les bactéries transforment en nutriments pour les plantes. Quant à ces dernières, elles filtrent l’eau pour les poissons.
Dans le système fermé qu’est l’aquaponie, chacune des composantes rend service à l’autre. Les poissons produisent des excréments que les bactéries transforment en nutriments pour les plantes. Quant à ces dernières, elles filtrent l’eau pour les poissons.

VOIR AUSSI
L’aquaponie jusque dans les écoles