Actualités 22 décembre 2021

Craintes de manquer d’un herbicide essentiel à la production de carottes

Des producteurs de carottes et de panais craignent de ne pas pouvoir s’approvisionner en herbicide linuron, commercialisé sous le nom de Lorox, à temps pour la saison 2022.

Le produit fabriqué aux États-Unis ne peut être importé au pays en ce moment, parce qu’il ferait l’objet d’analyses à l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Santé Canada. Or, les agriculteurs affirment ne pas disposer de solution de rechange équivalente pour lutter efficacement contre les mauvaises herbes. D’autant plus qu’il reste peu de temps pour trouver un plan B avant le printemps.

« Il me reste trois caisses de l’an passé et je ne suis pas capable d’en avoir en ce moment », s’inquiète Steve Dauphin, producteur de carottes à Saint-Roch-de-l’Achigan, dans Lanaudière. Selon lui, il s’agit du seul produit permettant de rentabiliser la culture de carottes et de récolter des légumes de qualité.

Du côté du commerçant Synagri, Éric Dionne a indiqué le 13 décembre ne plus recevoir de commandes des États-Unis depuis un mois. « Les gens nous appellent pour en avoir, mais on ne peut pas en recevoir. C’est comme ça partout au Canada », témoigne le directeur de l’approvisionnement, de la santé et de la protection des cultures.

Steve Dauphin, qui cultive 80 hectares de carottes, fait normalement ses provisions à ce temps-ci de l’année en prévision de la prochaine saison. À l’instar de 25 autres fermes de sa région qui ont cosigné une lettre envoyée à l’ARLA et à Santé Canada demandant « l’enregistrement » de l’herbicide linuron, il s’inquiète des « conséquences catastrophiques » sur sa production si le produit n’est pas sur le marché en 2022.

La directrice de la recherche et du développement à l’Association des producteurs maraîchers du Québec, Catherine Lessard, confirme qu’il n’existe pas d’équivalence, surtout pour les producteurs de carottes, mais aussi de panais, à l’herbicide de marque Lorox, qui est toujours homologué au Canada. Même si des produits de remplacement étaient homologués d’urgence, dit-elle, ils ne combleraient que partiellement les besoins de ces maraîchers pour lutter contre les mauvaises herbes. Et le désherbage manuel n’est pas envisageable pour la majorité des entreprises qui ne détiennent pas suffisamment de main-d’œuvre. « Les producteurs de carottes et de panais de partout au Québec sont inquiets et suivent ça de près. S’ils n’ont pas les bons outils sous la main à temps, ils produiront moins, voire pas du tout, indique-t-elle. Ce qui serait ironique, ce serait d’importer plus de carottes américaines cultivées avec ce produit que les producteurs là-bas ont le droit d’utiliser. »

Discussions en cours

Par voie de courriel, la direction des affaires réglementaires du fabricant NovaSource a reconnu que la disponibilité du produit au Canada pour la saison 2022 n’est « pas confirmée » en raison d’une « question réglementaire » qu’elle travaille à résoudre avec l’ARLA. Le produit serait « toujours à l’étude ». En date du 13 décembre, le fabricant américain espérait obtenir une réponse de l’Agence d’ici quelques semaines.

Santé Canada dit reconnaître l’importance du linuron comme herbicide, mais fait valoir qu’il est « de la responsabilité du fabricant de maintenir l’approvisionnement de ses pesticides homologués pour le marché canadien ». Le manufacturier, affirme-t-on, aurait « informé le secteur agricole d’un problème possible de disponibilité de ce produit ».