Actualités 30 janvier 2018

Le biocharbon : une avenue prometteuse pour l’agriculture durable

Au Québec, la superficie récoltée en fruits et légumes de serre a augmenté de 43 % entre 2011 et 2015. Afin de maintenir de hauts rendements, des apports élevés d’engrais minéraux et d’eau sont toutefois nécessaires, ce qui engendre des coûts élevés d’intrants d’engrais chimiques et occasionne de graves problèmes environnementaux.

Dans ce contexte, le biocharbon, produit par carbonisation de matières végétales en absence d’oxygène, pourrait constituer un composé intéressant pour optimiser l’utilisation de l’eau et la nutrition des plantes. En effet, il y a plusieurs milliers d’années, les habitants de certaines régions en Amazonie incorporaient du charbon d’origine végétale dans les terres infertiles, ce qui leur permettait d’obtenir des résultats exceptionnels. Cependant, les méthodes de fabrication actuelles et les biomasses utilisées produisent des biocharbons de qualité très variable qui, une fois utilisés, affectent différemment les rendements des plantes.

Évaluation du potentiel

Le projet de recherche que nous avons mené avait entre autres comme objectif d’aider à bien comprendre comment les propriétés physiques et chimiques d’un biocharbon affectent la fertilité du sol et la croissance de la plante, et d’évaluer son potentiel à être utilisé comme amendement dans un substrat horticole.

Deux expériences de 63 jours chacune, dont la première avec une culture de tomates et la deuxième avec une autre de poivrons, ont été conduites dans une serre de l’Université Laval. Trois biocharbons (écorce d’érable pyrolysée à 550 °C et à 700 °C et copeaux de pin pyrolysés à 700 °C) appliqués à quatre doses (0, 5, 10 et 15 % en volume) dans un substrat horticole et combinés avec deux doses de fertigation (50 % et 100 % de la dose recommandée) ont été comparés.

Vicky Lévesque a eu pour superviseur Hani Antoun, professeur retraité au Département des sols et de génie agroalimentaire. Crédit photo : FSAA
Vicky Lévesque a eu pour superviseur Hani Antoun, professeur retraité au Département des sols et de génie agroalimentaire. Crédit photo : FSAA

Les résultats obtenus ont confirmé que l’ajout de biocharbons a altéré différemment les propriétés physiques et chimiques du substrat, mais sans affecter les rendements des cultures. L’amendement avec 15 % de biocharbon d’érable produit à 700 °C a permis de réduire les pertes en azote par lessivage jusqu’à 94 %, et a réduit la consommation d’eau et l’apport en fertilisant à 50 % de la dose recommandée tout en augmentant les rendements de 28 % en tomates et de 20 % en poivrons, comparativement au substrat sans amendement et fertilisé avec la dose recommandée.

Étonnamment, les travaux de recherche ont démontré que l’augmentation des rendements n’était pas occasionnée par une amélioration de la nutrition de la plante, mais plutôt par une meilleure activité microbienne dans le substrat amendé avec le biocharbon d’érable produit à 700 °C.

En somme, ces travaux de recherche montrent clairement une avenue prometteuse pour les producteurs horticoles. Dans une optique d’agriculture durable, l’amendement en biocharbon pourrait avoir un effet bénéfique substantiel tant sur le plan économique qu’environnemental. 

Vicky Lévesque, Ph.D., agr., Doctorante en microbiologie agroalimentaire