Politique 15 novembre 2017

L’examen de Pangea est terminé

Le ministre de l’Agriculture, Laurent Lessard, a indiqué à La Terre avoir reçu récemment le rapport sur le modèle de Pangea placé « sous examen » au printemps dernier. Un modèle que l’Union des producteurs agricoles (UPA) continue de décrier.

« Je vais analyser le rapport », a précisé Laurent Lessard, qui prévoit avoir terminé sa réflexion d’ici la fin de l’année. Il rendra le document réalisé par La Financière agricole du Québec public par la suite.

Le ministre fait tout de même déjà certains constats et ne semble pas trop inquiet. Dans une entrevue le 8 novembre, il fait notamment remarquer que Pangea vise un portefeuille de 20 000 hectares sur les 6,3 millions d’hectares en zone agricole au Québec. « Le modèle québécois a changé », estime le ministre Lessard, qui cite en exemple quatre producteurs biologiques dans la région de Vaudreuil qui ont mis en commun quelque 2 600 hectares de terres pour réaliser des économies d’échelle. Les options de financement traditionnel, institutionnel ou par de grandes corporations sont toutes valables à ses yeux.

Le ministre fait par ailleurs une différence entre la première et la deuxième version du modèle de Pangea. « Si c’est pour développer plus d’agriculture, je vais être rassuré sur le modèle », indique Laurent Lessard, qui remarque que Pangea est peu actif dans les régions centrales où l’agriculture est déjà très développée. Deux entrepreneurs de Montmagny lui ont d’ailleurs confié leur satisfaction relativement à leur latitude dans leur partenariat avec Pangea.

Vente d’actions

 « Je ne veux pas que ce fonds-là soit susceptible d’être capté par la finance internationale », met toutefois en garde le ministre, qui se garde une marge de manœuvre sur des « failles » qui subsisteraient après l’analyse du rapport de la Financière.

« Pangea pourrait vendre 49,9 % de ses actions à un fonds étranger et le gouvernement n’aurait aucun droit de regard », a commenté le directeur général de l’UPA, Charles-Félix Ross, qui fait valoir que ce phénomène de vente d’actions à des étrangers a été remarqué dans les vignobles en France.

L’UPA réitère que le modèle Pangea crée une concurrence « déloyale » pour les agriculteurs puisque cette entreprise a accès à du capital patient soutenu par des crédits d’impôt, tandis que les producteurs comptent uniquement sur des prêts traditionnels. « Le modèle Pangea est basé sur la spéculation. Un jour, la bulle va éclater », insiste le directeur de l’UPA.

Québec solidaire dénonce Pangea

Québec solidaire (QS) est sorti publiquement pour dénoncer « l’accaparement des terres » réalisé par le « géant Pangea ».

« La relève agricole locale, déjà en difficulté, se fait prendre des terres par un géant montréalais qui a la latitude de spéculer et de mettre plus d’argent jusqu’à forcer les producteurs locaux à se retirer de la course », explique Gabriel Nadeau-Dubois, député de Gouin et porte-parole de QS en agriculture. Ce dernier dénonce aussi le fait que Pangea soit présenté comme un « partenaire » pour les producteurs, alors que, selon le parti politique, l’entreprise « détruit le modèle agricole familial québécois ». QS reproche par ailleurs à la Caisse de dépôt et placement du Québec et au Fonds de solidarité FTQ d’intensifier le phénomène en investissant dans Pangea.

Cette sortie de QS « fait écho » aux dénonciations de la Fédération de l’UPA du Bas-Saint-Laurent sur le même sujet. En entrevue à La Terre plus tôt cette année, Gabriel Nadeau-Dubois avait plaidé pour l’interdiction de certaines pratiques qui nuisent à la relève et alimentent la spéculation sur le prix des terres.