Bio 18 octobre 2017

Luzerne GM: le ministre de l’Agriculture ne veut pas de contamination

Interpellé par le débat portant sur la luzerne génétiquement modifiée (GM), le ministre de l’Agriculture du Québec, Laurent Lessard, mettra en place un comité. Un moyen jugé insuffisant par les opposants.

« Nous ne voulons pas que ça soit le “free-for-all”. Nous voulons éviter que de nouvelles cultures aient un impact négatif sur les cultures actuelles. […] Nous allons prendre des mesures pour qu’il n’y ait pas de contamination », a indiqué à La Terre Mathieu Gaudreault, attaché de presse du ministre Lessard.

Il affirme également que le ministre porte une attention particulière à la production biologique, « car ce sont des produits à valeur ajoutée et le bio est demandé par les consommateurs ».

Le comité qui sera mis en place d’ici quelques semaines sera chargé de dresser un portrait d’ensemble de la culture de la luzerne GM. Ce comité évaluera les risques de contamination et rédigera des recommandations. Impossible par contre de préciser l’échéancier, Mathieu Gaudreault ayant simplement spécifié : « Nous sommes conscients des impératifs. »

Mesures insuffisantes

Les producteurs du Saguenay–Lac-Saint-Jean ne veulent pas attendre les résultats d’un comité. Ils ont formellement demandé au ministre Lessard qu’il fasse adopter un règlement interdisant la luzerne GM sur leur territoire, une option rejetée par le ministre. « Il attend les résultats du comité et aimerait aussi mettre en place un projet pilote de coexistence entre producteurs de luzerne conventionnelle et GM. On est déçus, car si ça ne fonctionne pas, il sera trop tard », mentionne Lise Tremblay, de la Fédération de l’UPA du Saguenay–Lac-Saint-Jean.

Le coordonnateur de Vigilance OGM, Thibault Rehn, se dit heureux que le ministre veuille évaluer les risques de contamination, mais déplore que l’introduction de la luzerne GM s’effectue sans consultation. « Les sondages le démontrent : une grosse majorité des consommateurs ne veulent pas d’OGM », rappelle-t-il.

Évaluer les promesses des compagnies

Robert Berthiaume, expert en systèmes fourragers chez Valacta, apporte un angle différent au débat sur la luzerne GM. « Je regrette amèrement que la compagnie offre obligatoirement le caractère Roundup Ready avec la “basse lignine”. La “basse lignine” est obtenue en endormant un gène, tandis que la résistance au Roundup est obtenue en introduisant un gène. C’est très différent », précise l’expert, qui est à la retraite depuis quelques mois.

Il soutient que l’amélioration des variétés de plantes fourragères est essentielle à la rentabilité des fermes et apporte même des bienfaits pour la société. Il se dit ainsi favorable à l’utilisation d’une luzerne GM à basse lignine seulement, qui procure plus d’énergie à l’animal.  

Robert Berthiaume mentionne de surcroît que des variétés plus digestibles, non GM, sont disponibles. À cet égard, la chercheuse Caroline Halde de l’Université Laval s’attend à obtenir sous peu le financement nécessaire au lancement d’une grande étude comparant pendant trois ans plusieurs cultivars GM et non GM. « Survie à l’hiver, rendement, teneur en lignine, valeur nutritive… On veut évaluer s’il est rentable pour une ferme du Québec d’employer telle luzerne plutôt que telle autre », précise Mme Halde.

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