International 19 octobre 2017

La menace Trump plane sur le secteur agricole

Plusieurs politiques économiques du président américain Donald Trump pourraient assombrir des perspectives financières qui s’annonceraient autrement assez favorables pour le secteur agricole canadien dans la prochaine année.

« Je surveille Donald Trump. C’est la plus grosse variable », lance Maurice Doyon, agroéconomiste et professeur à l’Université Laval. Ce dernier fait valoir que la réforme de l’impôt envisagée par Trump, combinée à son éventuel plan de dépenses en infrastructures pourrait « stimuler deux fois » une économie qui va déjà relativement bien. Ce scénario de surchauffe économique ferait augmenter l’inflation américaine. « On pourrait parler d’une hausse plus importante des taux d’intérêt dans cette nouvelle dynamique », indique Maurice Doyon. Avec le temps, l’inflation et la majoration des taux d’intérêt pourraient se répercuter au Canada puisque la demande américaine stimulerait aussi notre économie qui va déjà bien. Les producteurs auraient alors de la difficulté à rembourser leurs dettes agricoles. Pour le moment, le Congrès s’oppose à Trump sur plusieurs plans et aucun de ses projets n’a encore abouti.

Jean-Philippe Gervais, économiste en chef de Financement agricole Canada (FAC) croit lui aussi qu’un revirement des politiques fiscale et commerciale aux États-Unis représente un risque pour l’économie américaine. Il estime que cela pourrait éventuellement entraîner une diminution de la demande pour nos produits, en particulier pour les protéines animales.

Joëlle Noreau, économiste principale chez Desjardins, affirme de son côté que la réforme fiscale américaine n’enflammerait pas tant que ça l’économie des États-Unis. La baisse d’impôt aux entreprises de 35 % à 20 % qui est proposée ne serait peut-être pas si importante si on la compare au taux d’impôt effectif de 25 % qui s’applique en ce moment. « On voit que les réformes de Trump ne progressent pas rapidement », ajoute Joëlle Noreau.

Le dollar en hausse

Outre la vigueur de l’économie, c’est la force du dollar canadien que surveillent les exportateurs. « S’il y a un facteur qui va jouer, c’est le dollar », indique Joëlle Noreau. Cette dernière estime que le dollar canadien va osciller entre 80 et 85 cents américains dans la prochaine année. « Un dollar à 85 cents, c’est complètement différent qu’à 75 cents », soutient Jean-Philippe Gervais. Celui-ci estime qu’une hausse de 10 cents du dollar canadien entraîne environ 50 $ de pertes de revenus nets par acre. Le dollar canadien oscille en ce moment autour de 80 cents américains, mais la moyenne de l’année 2017 est à 76 cents, avec un creux à 72 cents.

Taux d’intérêt

D’après l’économiste de FAC, il y a une « forte probabilité » que la Banque du Canada augmente encore son taux d’intérêt directeur d’ici janvier prochain. Selon Desjardins, le taux directeur canadien serait à 1,75 % à la fin 2018, alors qu’il se situe à 1 % en ce moment. « Les taux d’intérêt devraient rester dans une fourchette gérable, mais il faut demeurer vigilant », estime Isabelle Bouffard, économiste principale de l’Union des producteurs agricoles (UPA).