Bio 1 juin 2017

Lutte aux mauvaises herbes: « J’en ai bavé et j’en bave toujours »

L’envahissement par les mauvaises herbes représente l’un des principaux défis que l’agriculteur biologique a à relever.

Certains producteurs ont même délaissé le bio pour cette raison. « Si la plate-bande n’est pas bien désherbée et que les mauvaises herbes prennent le dessus, tes légumes sont moins gros et le rendement diminue. Bref, la moitié de ta production peut y passer », explique Nasser Boumenna, un maraîcher de l’Estrie.

« Beaucoup d’agriculteurs ont raté des cultures complètes. Moi-même, j’ai déjà dû abandonner des planches entières de carottes. Les mauvaises herbes… J’en ai bavé et j’en bave toujours », raconte-t-il avec humour. Aujourd’hui, les pertes de cultures associées aux mauvaises herbes sont rares dans sa ferme biologique. D’une part, en raison du fait que le maraîcher a développé un 6e sens. « Je sais à quel moment elles vont exploser et je me prépare en conséquence. » D’autre part, parce qu’il a pris les grands moyens pour diminuer l’ampleur de cette tâche fastidieuse qu’est le désherbage.

Les toiles

Nasser Boumenna déroule d’immenses toiles géotextiles pour protéger ses solanacées, comme les tomates, contre les mauvaises herbes. De plus, il plante certains légumes sur un paillis de plastique et sème l’entrerang avec du ray-grass, un engrais vert qui couvre rapidement la surface. « Certains maraîchers emploient leur tracteur pour le désherbage et ils y arrivent bien, sauf que moi, je ne suis pas le meilleur avec ça. Alors je me suis trouvé des techniques pour diminuer la pression des mauvaises herbes », explique-t-il.

Les toiles géotextiles d’une largeur de 4,5 m de même que dans ses abris tunnels sont laissés durant tout l’été en plein champ. Celles-ci ont l’avantage d’éliminer le désherbage sur le rang autant que sur l’entrerang.

Occultation

Le maraîcher pose également ces toiles géantes sur les parcelles où seront disposées les graines de carottes, plus tard vers le milieu d’été. Cette technique d’occultation élimine 90 % des mauvaises herbes, estime M. Boumenna. « Ça fonctionne surtout pour contrôler les annuelles. Avec les vivaces, c’est un peu moins efficace », précise-t-il. Chose certaine, quand il sème ses carottes, il enlève les toiles et passe à l’action sans perdre de temps à désherber. « Certains emploient un plastique qui empêche l’eau de pénétrer, mais ce n’est pas réutilisable, alors j’aime moins ça », mentionne le copropriétaire des Jardins d’Arlington, une culture maraîchère de 5 ha située à Stanbridge East. L’automne venu, il importe de bien nettoyer les toiles sinon des maladies fongiques pourraient contaminer les cultures subséquentes.

« On va y goûter »

Toutes les cultures ne peuvent être protégées par les toiles. Celles qui sont récoltées rapidement comme la laitue sont semées sur un sol à nu. Le maraîcher ne s’en fait pas outre mesure, mais reste sur le qui-vive. « Je regarde les prévisions météo du début de juin. Il fera chaud et je les vois venir [les mauvaises herbes]. On va y goûter! » affirme-t-il, sourire en coin.