Politique 5 septembre 2014

Accaparement des terres : le ton monte

6b18e7047579f6a3f2612193d0e551dd

« Une pratique extrêmement grave », prévient Yves-François Blanchet, député péquiste de Drummond.

Le gouvernement Charest et son ministre de l’Agriculture, Pierre Corbeil, « cautionnent une pratique extrêmement grave » en permettant aux spéculateurs et institutions financières de « mettre la main sur les terres agricoles de nos producteurs », dénonce le député péquiste de Drummond, Yves-François Blanchet.

« Ça n’a aucun bon sens et il faut dénoncer l’inaction du gouvernement dans ce dossier préoccupant. Il faut protéger la propriété de nos terres agricoles et faire en sorte qu’elles restent entre les mains des familles qui les cultivent », a confié le député en entrevue à la Terre.

Or, selon lui, le ministre de l’Agriculture ne semble pas mesurer l’ampleur du phénomène, encore moins le danger qui guette les agriculteurs. Il ne comprend pas pourquoi le gouvernement n’est pas encore intervenu pour freiner l’appétit d’institutions financières. Rappelons que la Banque Nationale a acquis plus de 5000 hectares de terres agricoles au Saguenay–Lac-Saint-Jean dans le but de les offrir aux agriculteurs de la région, mais en « location », comme l’a relevé de son côté le député de Kamouraska-Témiscouata et porte-parole du Parti Québécois en agriculture, André Simard.

Le député de Drummond n’est guère plus rassuré par les intentions de la Coalition Avenir Québec (CAQ) et de son chef, François Legault, qui a l’intention d’encourager l’acquisition des terres par les institutions financières. « Il y a de quoi se poser de sérieuses questions sur leur vision de l’agriculture », précise Yves-François Blanchet.

Une étude controversée

Il faut croire que le mouvement de contestation dépasse largement la frontière politique. Sur son blogue, le chercheur Gilles Bourque, de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC), n’y va pas de main morte pour remettre en question la décision du ministre de l’Agriculture de faire réaliser une nouvelle étude sur l’accaparement des terres.

La semaine dernière, le ministre de l’Agriculture en a surpris plusieurs, dans les milieux politiques et agricoles, en confiant au Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) le mandat pointu de « documenter l’acquisition » des terres en sol québécois pour connaître « l’état de la situation » dans le dossier préoccupant de l’accaparement des terres agricoles. Raison invoquée pour justifier un tel mandat de trois quarts de million sur trois ans à CIRANO : vérifier, sur le terrain, qui sont les acheteurs de terres et quel rendement est recherché par les spéculateurs et les investisseurs institutionnels.

« C’est comme si on engageait un renard pour enquêter sur la sécurité du poulailler! » a réagi le chercheur de l’IRÉC. Il voit là un mandat chargé de « favoritisme » et il craint déjà que les conclusions de cette étude par des « idéologues du laisser-faire » donnent raison à ceux qui prétendent qu’il faut permettre aux grands groupes financiers de faire main basse sur les terres agricoles, au détriment des agriculteurs.
« On finance avec notre argent un think tank étroitement lié à la famille libérale », dénonce le chercheur sur son blogue.