Actualités 11 juillet 2016

Nouvelle tendance : être à l’écoute de son sol et de ses plantes

Irriguer en fonction des besoins des plantes et des sols : voilà une technique en apparence simple, qui a cependant tardé à avoir la cote au Québec.

Pendant ses études en génie agroenvironnemental à l’Université Laval, Mathieu Ricard a observé de mauvaises pratiques d’irrigation pourtant bien implantées chez nous. « Au Québec, on a beaucoup d’eau. Donc, on n’est pas toujours conscients de l’importance de bien la gérer pour éviter le gaspillage », soutient-il. C’est
pourquoi, en 2011, le jeune entrepreneur a décidé de fonder Irrig-Expert, qui s’appelle aujourd’hui Riego. L’entreprise lanaudoise se spécialise dans la vente, l’installation et l’entretien de pivots et de rampes d’irrigation de marque Otech, en plus d’offrir des services-conseils.

Mathieu Ricard a fondé Irrig-Expert (aujourd’hui Riego) en 2011 dans l’espoir d’introduire de meilleures pratiques en irrigation.
Mathieu Ricard a fondé Irrig-Expert (aujourd’hui Riego) en 2011 dans l’espoir d’introduire de meilleures pratiques en irrigation.

Le concept derrière Riego : arroser plus souvent, à plus petites doses. Les plantes, explique Mathieu Ricard, préfèrent recevoir une petite quantité d’eau tous les jours plutôt que d’en recevoir une grande quantité une seule fois. « C’est comme si tu étais perdu dans le désert. Tu préférerais avoir un peu d’eau tous les jours plutôt qu’une grosse bouteille que tu es obligé de boire au complet rapidement », illustre-t-il.  Grâce à cette technique, le président espère pouvoir introduire de meilleures pratiques d’irrigation au Québec.

Des systèmes à basse pression

Étant donné qu’un apport trop fréquent en eau peut limiter le développement racinaire, cette nouvelle technique nécessite d’adapter l’irrigation aux types de sols et de plantes. « Par exemple, dans la culture de pommes de terre, on dit qu’il faut donner environ 5 mm d’eau par jour. On peut calculer que ça fait 35 mm par semaine. Si notre sol est seulement capable d’absorber 20 mm sur cette période de temps, on en a pompé 15 de trop. Ce gaspillage finit par coûter cher aux producteurs », calcule-t-il.

Selon lui, l’utilisation d’un pivot ou d’une rampe automotrice s’avère donc avantageuse, puisque ces deux systèmes d’irrigation à basse pression permettent d’adapter l’arrosage aux besoins réels des sols et des plantes. Pour irriguer à basse pression, il faut amoindrir la portée des arroseurs et augmenter leur nombre. Il en résulte une meilleure uniformité d’arrosage et une diminution des pertes par dérive et évaporation. En régulant la pression à un niveau plus bas, on réduit également la puissance de pompage… et les coûts en carburant. « Ces produits sont donc plus avantageux que les systèmes d’irrigation traditionnels par canon à haute pression », affirme M. Ricard.

Ces systèmes d’irrigation sur pivot ou sur rampe peuvent être installés dans la plupart des champs, peu importe la super cie. « Il y a seulement les champs en pointe où c’est plus difficile à installer », note Mathieu Ricard. La mise en place d’un pivot engendre des pertes de superficies cultivables d’environ 1 %, ce qui est « largement compensé par l’augmentation des rendements », assure-t-il.

Tendance fertigation

Selon Mathieu Ricard, de Riego, cette année, la tendance sera à la fertigation, cette technique qui consiste à épandre des fertilisants solubles par irrigation. La fertigation est déjà populaire dans la culture de fraises et d’autres petits fruits dont l’arrosage est fait sur le principe du « goutte à goutte ». Or, les systèmes à
basse pression par pivot ou par rampe offrent un arrosage assez uniforme pour pouvoir appliquer en même temps des fertilisants, même dans les productions
comme la pomme de terre, souligne M. Ricard. Six de ses clients ont opté pour cette méthode cette année.

Irriguer à l’aide de son cellulaire

Les rampes automotrices et les pivots d’irrigation Otech possèdent un ordinateur interne qui permet la télégestion, une technologie de plus en plus en vogue. Le système donne la possibilité de gérer à distance la dose d’eau à appliquer, l’horaire d’arrosage, les arrêts de sections, etc. « Il est possible de démarrer le tout à distance et de recevoir une alerte sur son téléphone en cas de problème », explique le président de Riego, Mathieu Ricard, qui travaille actuellement à mettre à jour ce système de télégestion.

Attention au marketing

Chez ADS Canada, un manufacturier de produits de drainage, le représentant de la division agricole pour le Québec Éric St-Onge met en garde les agriculteurs
quant aux nouvelles tendances. Pour lui, il faut avant tout choisir le bon produit selon le type de sol. « Depuis deux ans, il y a énormément de marketing concernant les drains enrobés d’une membrane avec des ouvertures de 250 microns, donc une membrane tricotée serrée. Ce n’est pas nécessaire pour tous les terrains et si ce n’est pas installé au bon endroit, ça peut être problématique », mentionne-t-il.

Si cette membrane peut être efficace pour des sols à sable très fin, elle peut se colmater si celui-ci est plus grossier. « Je vois des agriculteurs qui veulent absolument ce nouveau produit, mais ce n’est pas nécessairement bon pour eux. Il faut faire très attention », prévient M. St-Onge. Le mieux reste selon lui de faire affaire avec un entrepreneur compétent, qui effectuera une analyse du sol et recommandera la membrane appropriée.

 

Audrey Desrochers