Actualités 29 avril 2016

Le hersage de printemps : en surface, mais pas à la légère

La herse est un « instrument agricole traîné, formé d’un châssis muni de dents rapprochées travaillant à faible profondeur », dit le Larousse agricole. Elle prépare le lit de semences et enfouit engrais ou produits antiparasitaires. Une grande diversité d’appareils polyvalents peut aujourd’hui effectuer ce travail.

« La compagnie Case International installe des sections de herse à dents rigides ou à cages roulantes à l’arrière d’outils polyvalents comme le cultivateur Tiger-Mate 200 ou le pulvériseur à disques ondulés True Tandem », relate Francis Roy, spécialiste des produits pour Les Équipements Adrien Phaneuf.

La marque Kuhn propose aussi ce type d’outils sur lesquels se combinent disques, dents, peigne, roue soleil et rouleaux. Parmi les nouveaux modèles, notons la déchaumeuse à disques Optimer +, ou encore l’instrument de labour vertical Excelerator qui effectue un hersage par « labour vertical » avec ses disques ondulés à angle ajustable.

Mordre la terre à petites dents

Les instruments à dents font encore un bon hersage de printemps, estime l’ingénieur agronome Georges Lamarre, conseiller en conservation des sols et de l’eau à la direction générale de la Montérégie-Ouest du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) à Sainte-Martine.

« Le vibroculteur est moins populaire, mais c’est encore un très bon outil, notamment dans les sols argileux, dit M. Lamarre. L’essentiel est de le passer en s’arrêtant à la profondeur du semis. » Les cultivateurs à dents en C font aussi selon lui un très bon lit de semences, surtout avec les nouveaux dispositifs de contrôle de profondeur au laser. « Il est normal de voir la pointe de la première dent qui suit la trace du tracteur, insiste M. Lamarre. Il faut surtout ne pas essayer de briser cette trace de roue en hersant : les dents voisines et le deuxième passage vont abriller la trace, et la levée n’en sera pas affectée. Bien sûr, on abaissera adéquatement la pression des pneus pour réduire la compaction. »

Faire tourner ses disques avec les déchaumeuses

La plupart des déchaumeuses à disques modernes hersent efficacement, au moyen de deux trains de disques (à l’angle parfois ajustable) et d’un rouleau situé à l’arrière. Le fabricant Pöttinger propose sa déchaumeuse compacte Terradisc, large de 3 à 6 m. « Cette déchaumeuse à grands disques [58 cm] crénelés travaille le sol entre 3 et 12 cm de profondeur », décrit Scott Mastine, gérant de territoire chez Pöttinger Canada pour l’Est du pays. « Mais il faut s’assurer de bien la mettre de niveau sur toute sa longueur, souligne M. Mastine. D’autant plus qu’elle doit rouler à une vitesse de 8 à 16 km/h. »

« Si on passe la Terradisc l’automne d’avant, il suffit de la passer deux fois ou parfois même une seule fois au printemps avant de semer, poursuit M. Mastine. On peut équiper la herse d’un semoir à plantes fourragères ou à céréales. » Pöttinger offre aussi une déchaumeuse à dents, la Synkro, également combinable à un semoir.

René Boivin, spécialiste des produits chez Lemken Canada.Photo : GRacieuseté de Lemken Canada
« Pour connaître un outil de hersage, l’idéal est d’assister à une démonstration ». René Boivin, spécialiste des produits chez Lemken Canada.Photo : Gracieuseté de Lemken Canada

Lemken offre les déchaumeuses compactes Heliodor et Rubin. La première réalise un lit de semences sur un sol léger et moyen, la seconde sur des chaumes et des engrais verts abondants. Leur largeur de travail va de 3 à 16m. On peut aussi coupler certains modèles avec un semoir. Les deux rangées de disques crénelés et concaves des déchaumeuses Heliodor et Rubin travaillent respectivement à partir d’une profondeur de 3,8 cm et de 4,5 cm. « Si l’avant et l’arrière ne sont pas au même niveau, des bourrelets de terre nuiront au semis », confirme René Boivin, spécialiste des produits chez Lemken Canada.

Des disques tournent à Saint-Sylvère

Sur les quelque 200 hectares de sa ferme, Stéphane Trottier utilise depuis 2013 une déchaumeuse Terradisc de Pöttinger. Laissant au sol ses résidus de maïs et le ray-grass semé en intercalaire, M. Trottier saute aujourd’hui une étape. « Pour passer le cultivateur au printemps, je devais travailler le chaume de maïs l’automne d’avant. Mais maintenant, je n’ai qu’à passer deux fois la déchaumeuse au printemps, ou même une seule fois dans les sols plus sableux », explique le producteur de Saint-Sylvère. Après son soya ou ses céréales à petits grains, un seul passage suffit généralement.

« J’ai comparé la déchaumeuse avec le cultivateur dans un champ : le semis s’est fait sans problème après la déchaumeuse, mais la moitié travaillée au cultivateur était trop vaseuse », a constaté le jeune producteur. « C’est le rouleau qui détermine la profondeur de travail, dit Stéphane Trottier. Le rouleau reçoit une bonne partie du poids de la déchaumeuse, avec l’avantage qu’il enfonce les roches et les cotons de maïs. »

M. Trottier s’assure de prévenir le lissage de printemps en travaillant dans un sol suffisamment sec et en protégeant la structure de ses sols par le travail minimal. 

Des herses rotatives pour faire tourner la terre

Les herses rotatives, quant à elles, agissent au moyen d’une série de rotors verticaux à deux dents, suivie d’un rouleau émotteur-tasseur. Comme sur les déchaumeuses à disques, entre ces deux éléments peut s’intercaler un peigne pour rediriger le flux de terre. Une lame niveleuse s’ajoute parfois à l’avant ou à l’arrière de l’appareil.

Lemken offre la herse rotative Zirkon, qui travaille sur 2,5 m à 6 m de large. Manuellement et sans outil, on peut alterner entre deux vitesses et deux sens de rotation, sans changer de dent ou de pignon. « Dans un sens, à la position traînante, la herse nivelle mieux et laisse les pierres dans le sol, et dans l’autre, à la position agressive, elle mélange mieux la terre et les résidus », explique René Boivin.

Kuhn fabrique de son côté une grande variété de herses rotatives, avec plusieurs vitesses de rotation. Elles hersent une largeur de 1,2 à 6 m, pour une puissance maximale du tracteur de 80 à 280 ch. Pöttinger a sa propre version, la Lion, hersant sur 2,5 à 6m, pour une puissance maximale du tracteur de 140 à 270 ch et un choix d’une à trois vitesses. Les herses rotatives des équipementiers Kuhn, Lemken et Pöttinger se combinent à un semoir.

Petit conseil en passant : « Quand il y a des creux dans le champ, dus par exemple à l’enlèvement d’une roche, on peut y passer la herse rotative une première fois; ensuite, on hersera l’ensemble du champ », suggère Francis Roy, des Équipements Adrien Phaneuf. 

La terre tourne sous la herse à Sainte-Angèle

Producteur laitier à Sainte-Angèle-de-Monnoir en Montérégie, André Vadnais utilise sa nouvelle herse rotative Kuhn depuis deux ans sur 80 hectares de plantes fourragères, de maïs-ensilage et d’orge. Il l’a combinée cet été avec un semoir Solitair de Lemken. « Le lit de semences est très beau et la levée beaucoup plus égale, dit M. Vadnais. On peut mieux enfouir les engrais et il y a moins d’érosion grâce au roulage de la terre. »

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« Le hersage doit rester en surface, pour protéger la vie et la structure du sol ». Francis Roy, spécialiste des produits pour le Groupe Phaneuf. Photo : Joanie Voyer

Au printemps, le producteur se limite à un passage de herse rotative (mais après un labour d’automne dans les chaumes de maïs-ensilage). Il dit avoir labouré plus facilement l’automne dernier. « La herse rotative est moins rapide que le vibro, ajoute M. Vadnais, mais on ne passe qu’une fois et, dans mon cas, le tracteur force et consomme moins. »

Le printemps humide de 2014 avait causé la fonte des semis par les champignons Pythium chez plusieurs producteurs de sa région. Mais pas dans ses champs. « L’eau s’infiltre mieux, car il n’y a pas de lissage, et on ne remonte pas de terre humide en surface comme avec le vibroculteur », explique M. Vadnais. Le producteur n’a pas constaté jusqu’à présent de problème de battance. « La terre est restée bien molle en surface, dit-il. Même en 2014, l’eau s’est toujours bien infiltrée. »

Quel outil choisir?

Les grands fabricants proposent des instruments de hersage ayant chacun leurs qualités. « Le choix est difficile, reconnaît Georges Lamarre. Il faut se fier aux bons témoignages qu’on entend. L’idéal serait d’alterner entre plusieurs outils, à dents et à disques. »

 

Hubert Brochard