Actualités 19 novembre 2015

Intervenir en agriculture est toujours aussi pertinent

Une étude réalisée par une équipe d’agroéconomistes du Groupe Agéco montre que les raisons qui ont mené les États à intervenir pour soutenir l’agriculture à partir des années 1930 sont toujours pertinentes aujourd’hui, même si les fermes et le marché ont beaucoup évolué dans les dernières décennies.

Commandée par l’Union des producteurs agricoles (UPA), cette étude contraste fortement avec celles qui ont été menées pour l’État québécois au cours des années passées, notamment le rapport Saint-Pierre, le livre vert pour une politique bioalimentaire et la commission Robillard, et qui militaient plutôt vers une moins grande intervention en agriculture. Ces dernières études s’inscrivent dans un courant plus général de désengagement de l’État dans plusieurs domaines.

Les deux auteurs de l’étude, Catherine Brodeur et Frédérick Clerson, rappellent que pratiquement tous les risques spécifiques à la production agricole identifiés au moment de la définition du « problème agricole » par les économistes de renom Galbraith et Black, en 1938, demeurent présents à divers degrés. On peut même constater que d’autres risques se rajoutent aujourd’hui à cause de la mondialisation des marchés et de la plus grande fluctuation des prix qui l’accompagne, de la variation des taux de change et des changements climatiques, qui accentuent les problèmes météorologiques que les agriculteurs ont toujours connus.

Les risques de biosécurité, qui peuvent mener à une fermeture des frontières, sont également plus présents qu’avant et la perte de biodiversité accentue les risques de maladie. Finalement, la prise en compte des questions environnementales ajoute des coûts, qui sont difficiles à refiler dans le marché. Tous ces éléments mettent en relief l’imprévisibilité de l’équation déjà complexe du milieu du 20e siècle.

L’UPA veut convaincre l’État d’investir

Encore récemment, le ministre de l’Agriculture du Québec déposait une étude de l’Institut du Québec qui montrait que le secteur agroalimentaire est le plus important dans l’économie du Québec, devançant même l’aéronautique. « Avec cette nouvelle étude, on veut convaincre les gouvernements de l’importance d’investir en agriculture avec les producteurs et l’industrie », souligne Charles-Félix Ross, économiste en chef de l’UPA, qui précise qu’il sera impossible de générer toutes ces retombées à long terme sans un « partage de risques » avec l’État. Si les risques sont trop élevés, l’économiste estime qu’il n’y aura pas d’investissements suffisants.

Des problèmes agricoles qui persistent

Des problèmes bien antérieurs au 21e siècle faisaient partie du « problème agricole » ayant mené à la mise en place de politiques agricoles telles que le crédit et les assurances agricoles, les subventions, la gestion de l’offre, l’aide à l’exportation et l’encadrement de la mise en marché au siècle dernier. Malgré les changements, ces problèmes persistent encore aujourd’hui et se sont même accentués dans certains cas.

La grande volatilité des prix en agriculture, par exemple, s’explique notamment par le fait que la demande pour les aliments ne varie pas comme celle d’autres produits en fonction des variations des prix des denrées ou de revenus des consommateurs. Aujourd’hui, l’ouverture des frontières par des accords de libre-échange fait en sorte que les surplus d’ailleurs peuvent déstabiliser notre marché beaucoup plus facilement.

La concentration des fournisseurs ou des acheteurs est encore plus grande aujourd’hui qu’au milieu du 20e siècle. Ainsi, quatre semenciers occupent 54 % du marché mondial de ce secteur. Au Québec, trois épiciers contrôlent maintenant 66 % du marché.

 

Plus de détails dans l’édition du 18 novembre de La Terre de chez nous.