Élevage 29 août 2014

Un intégrateur se vide le cœur

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Intégrateur de veaux de grain, Luc Demers en a assez d’être considéré du mauvais côté de la clôture.

« Les intégrateurs ne sont pas tous des méchants à abattre. Nous donnons une chance à des jeunes. C’est nous qui prenons le risque de l’inexpérience, fait-il valoir. L’intégration, c’est une classe oubliée, et personne ne se demande pourquoi elle a pris autant d’importance : parce que le financement n’est pas là », affirme le propriétaire des Élevages Laurier, qui met en marché 2000 veaux/année, en plus d’être directeur technique pour un groupe de producteurs qui commercialisent 15 000 veaux annuellement.

L’entrepreneur reconnaît toutefois que « les méchants intégrateurs » ont coupé les contrats de leurs intégrés. « On a réduit les paies d’élevage parce qu’avec du maïs à 300 $/tonne, on n’arrive plus, plaide-t-il. Mes veaux mangent 80 % de maïs. Je n’ai pas une grande marge de manoeuvre pour être efficace. »

Cette absence de marge, les indépendants la vivent aussi. « Je reçois énormément d’appels de producteurs qui sont à leur compte depuis 20 ans. Je ne pense pas que ce soit normal », dit-il.

ASRA

Luc Demers pointe du doigt l’assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA), dont le modèle de coûts de production ne reconnaît pas les intrants à leur juste valeur. Il dénonce d’ailleurs l’inclusion d’un revenu associé aux cultures. « Il n’y a qu’un producteur sur deux qui fait des cultures », dénonce-t-il. À son entreprise, les cultures associées représentent une perte de 60 000 à 100 000 $ pour 2000 veaux produits. L’intégrateur propose deux modèles de coûts de production : un pour les entreprises qui cultivent des terres et un second pour les sans-sol.

Équilibre

M. Demers prône l’équilibre entre les différents modèles d’élevage. Pour cet intégrateur, la seule différence entre un indépendant et lui réside dans le nombre de veaux produits. Les intégrateurs ne sont cependant pas tous égaux. « Un intégrateur aussi impliqué dans l’abattage et un intégrateur qui fait seulement de l’élevage, c’est très, très différent », nuance-t-il.

En effet, les entreprises qui contrôlent toute la chaîne jusqu’à la transformation ont le loisir de jouer avec les marges de leurs activités en aval de la production. Luc Demers propose ainsi que Québec regarde les profits des entreprises. « Si le gouvernement ne veut pas payer d’ASRA, qu’il regarde les marges de tout le monde », conclut-il.