Élevage 29 août 2014

Un labyrinthe juridique dans le dossier Levinoff-Colbex

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Un jugement de la Cour supérieure rendue en février représente un dédale de procédures juridiques concernant la contribution spéciale pour le développement de la mise en marché des bovins de réforme.

Le 7 février, le juge André Denis, de la Cour supérieure, refusait d’obliger 21 agriculteurs à verser les contributions de 53,86 $/vache réformée dues à la Fédération des producteurs de bovins du Québec (FPBQ) pour les années de perception 2008 et 2009. Mise en place en 2008, cette contribution visait à recapitaliser 30 M$ dans l’abattoir Levinoff-Colbex.

De l’avis du juge Denis, ces 21 dossiers constituent des causes pendantes au 23 décembre 2010, époque où la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec (RMAAQ) n’avait pas le pouvoir d’ordonner le paiement de dommages-intérêts. Avec l’adoption de la loi 28, le 30 novembre 2011, le gouvernement lui a redonné ses pouvoirs, en faisant cependant exception des causes pendantes au 23 décembre 2010. La décision de la Cour supérieure ne concerne que ces 21 cas, sur un total de 6 500 producteurs, et couvre les années 2008 et 2009 sur les 7 années de perception, souligne la FPBQ. Les montants impayés par ce groupe s’élèvent à environ 120 000 $.

La Fédération conteste ce jugement. Si la Cour d’appel penche en sa faveur, celle-ci retrouvera ses recours contre les agriculteurs qui n’ont pas acquitté leurs contributions. En attendant le verdict, la RMAAQ a suspendu le traitement de certains dossiers de perception pour 2008 et 2009. En avril, elle a rendu 13 jugements où elle constate qu’elle ne possède pas la compétence pour ordonner le paiement de la contribution spéciale.

Multitudes de décisions

En mars, la Régie a cependant rendu une série de décisions favorables à la FPBQ. Elle a ainsi rejeté les requêtes de plus de 80 producteurs qui réclamaient qu’elle annule les factures émises par la Fédération. L’Association de défense des producteurs de bovins du Québec (ADPBQ), qui regroupe des éleveurs opposés à l’achat de l’abattoir Levinoff-Colbex par la FPBQ, a l’intention de demander la révision judiciaire de ces décisions. Elle attend toutefois un autre jugement de la Cour supérieure quant à la validité du Règlement sur les contributions des producteurs de bovins du Québec. En effet, un groupe d’une quarantaine d’éleveurs demande au tribunal d’invalider ce règlement qui permet à la FPBQ de percevoir le 53,86 $. Il conteste également l’indépendance et l’impartialité de la Régie. Le groupe exigeait plus de 800 000 $ à la Fédération. Selon cette dernière, ces réclamations ont maintenant été abandonnées. L’avocat de l’Association, Me François-Michaël Verret, n’a pas rappelé la Terre.

Factures salées

Chaque année, la contribution spéciale permet de récolter environ 5 M$. De 2008 à 2013, les taux de perception se sont élevés à 99 %; 98,1 %; 97,1 %; 96,4 %; 94,6 % et 90,7 %. Les paiements accusent un retard de près de 1,2 M$ sur les 30 M$ qui doivent être amassés à la fin de 2014.

Depuis 2008, toutes les démarches juridiques font gonfler les frais de perception. Ceux-ci frôlent maintenant les 2 M$. « Ce montant est très élevé pour les producteurs qui, même s’ils ne sont pas tous heureux, payent leurs factures à la Fédération, estime le président de l’organisation, Claude Viel. La très grande majorité des producteurs est due pour passer à autre chose. Ils sont tannés d’en entendre parler. »

Le dirigeant « sent un peu d’acharnement » de la partie adverse. « Les producteurs qui sont des opposants, je présume qu’ils payent des frais d’avocats probablement plus élevés que les factures que la Fédération leur envoie. Ils se battent sur une question de principe, mais à la fin, s’ils perdent la cause, ils vont devoir payer quand même, affirme M. Viel. Et tous les autres producteurs qui payent leurs factures sont un peu frustrés qu’il y en ait qui ne veulent pas le faire », termine-t-il.