Actualités 29 août 2014

Agriculteurs et transformateurs: même combat

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La transformation alimentaire se porte bien au Québec, mais le secteur s’expose à être décalé, faute d’investissements.

Voilà l’un des enjeux soulevés par Michel Morisset, professeur titulaire à l’Université Laval et conférencier au déjeuner-causerie ATA-ITA, au 13e Salon de l’agriculture, le 11 janvier dernier.

Le Québec accuse un retard de plus en plus « préoccupant » par rapport à l’Ontario à cet égard. « Nos voisins ontariens consacrent maintenant 700 M$ par an à ce chapitre, contre 300 M$ au Québec. Le fossé n’a cessé de se creuser depuis dix ans », a signalé M. Morisset. Les marges bénéficiaires inférieures au Québec, dues entre autres à la petite taille de nos usines, expliquent en partie ce retard, un état de fait qui devrait préoccuper les producteurs d’ici. « Si les transformateurs québécois ne possèdent pas d’usines de classe mondiale, ils auront de la difficulté à concurrencer les produits venant de l’Ontario et de l’étranger et ils ne pourront plus acheter les produits agricoles d’ici », a-t-il confié à laTerre, évoquant les exemples de Bonduelle et l’usine de trituration de soya et de canola de TRT ETGO.

La transformation constitue le passage obligé de la vaste majorité des produits agricoles. Pour l’heure, les industriels québécois s’approvisionnent à hauteur de 45 % chez les agriculteurs d’ici et complètent leurs achats au Canada (22 %) et à l’étranger (12 %). Ils vendent 38 % de leurs produits aux détaillants et aux restaurateurs du Québec, mais la part qui va aux exportations interprovinciales (27 %) et internationales (17 %) reste très importante. Les viandes, le porc surtout, demeurent le fer de lance des exportations québécoises, qui affichent une croissance de 3,9 % par an, supérieure à l’Ontario, et qui dépassent les 4 G$.

Le lien entre les distributeurs et les agriculteurs, et même avec les transformateurs, est beaucoup plus ténu. Ils s’approvisionnent déjà ailleurs qu’au Québec pour au moins la moitié de leurs produits alimentaires, une réalité qui pourrait s’accentuer avec l’expansion de Wal-Mart et l’arrivée de Target au pays, reconnues pour mettre une pression à la baisse sur les prix.

Les transformateurs québécois n’ont d’autre choix que d’améliorer leur compétitivité « pour demeurer sur les marchés et pour conserver leur accès aux tablettes des supermarchés, là où s’échangent les plus gros volumes de produits alimentaires », selon M. Morisset. Ils devront de surcroît composer avec les exigences de plus en plus élevées des grandes chaînes de détaillants au chapitre de la responsabilité sociale, de l’environnement et de la traçabilité. Devant tous ces défis, les transformateurs et les agriculteurs ont tout intérêt à ne pas diluer leurs forces dans des débats stériles.