Actualités 8 octobre 2014

Récolter de la biomasse

1 (2)2 (3)3 (2)4 (2)4b5 (1)6 (1)7 (1)8 (1)9 (1)10

Le Centre de développement des bioproduits Biopterre organisait en mai dernier une démonstration d’équipements de récolte de biomasse forestière, notamment de saule à croissance rapide. Coup d’œil sur une filière québécoise en développement et à fort potentiel dans la région du Bas-Saint-Laurent.

La culture de plantes ligneuses comme le saule à croissance rapide suscite l’intérêt à tel point que de nombreux projets de conversion de chaufferies au mazout vers la biomasse émergent dans les municipalités et plusieurs institutions dans le Bas-Saint-Laurent. Les avantages sont nombreux, selon Yannick Pilon, chef de projet chez Biopterre : « Il y a beaucoup de terres en friche dans la région, des terres à pauvre valeur agronomique. Elles pourraient être valorisées et produire de la biomasse énergétique. » Déjà, un projet s’est concrétisé à Mont-Carmel. La municipalité alimente sa chaudière avec de la biomasse de saule et elle valorise ses boues d’épuration dans les champs où on le produit. L’approvisionnement à proximité des projets de chaufferie s’avère également avantageux, car faire voyager des copeaux ou des granules de bois sur de longues distances coûte cher. La production de la biomasse de saule assure également aux municipalités ou autres utilisateurs un approvisionnement stable et une constance dans le type de matière, en plus d’être à l’abri de grandes fluctuations de prix de la biomasse forestière. « La valeur énergétique d’une tonne de copeaux de saule est équivalente à celle d’une tonne de biomasses forestières », mentionne Yannick Pilon.

Cependant, un des défis de cette filière consiste à développer de la machinerie adaptée à la récolte et à la transformation de cette biomasse. « Biopterre organise des démonstrations afin de favoriser le transfert d’expertise. La récolte de biomasse est liée à un secteur d’activité pour lequel on réalise plusieurs projets avec des partenaires comme la MRC de La Pocatière », mentionne Marie-Pierre Dufresne, chargée de projets chez Biopterre. Les démonstrations de quatre équipements de récolte spécialisés se sont déroulées chez Roger Charmard, un producteur de saules à croissance rapide de Saint-Jean-Port-Joli.

Producteur de saules à croissance rapide : Roger Charmard

À Saint-Jean-Port-Joli, Roger Charmard est producteur de saules à croissance rapide : « Depuis 2005, j’ai planté 15 000 boutures de saule sur huit hectares ». Cet entrepreneur en plantation énergétique estime à 1,5 million le nombre de boutures de saule implantées dans la région dans divers projets comme ceux de brise-vent industriels. « L’implantation du saule est relativement coûteuse. Mais son avantage réside dans le fait qu’on peut récolter rapidement ses propres boutures pour augmenter ses superficies et donc commencer une plantation avec un demi-hectare seulement », indique Roger Charmard.  Par ailleurs, on peut tirer de multiples bénéfices de ce type de production : revitalisation des terres en friche, utilisation de boues d’épuration comme fertilisants, utilisation du saule dans les chaufferies, etc.

Barre de coupe ou faux à recéper – Elkear (fabriquée au Danemark et distribuée par Samson Canada)

Le recépage du saule stimule la production des rejets de souche, donc du rendement en biomasse. Entre 16 à 18 000 tiges de saules sont implantées à l’hectare. L’année suivant leur implantation, il est fortement recommandé de recéper. La première récolte se fait dès la quatrième année d’implantation, et le rendement moyen annuel est de 12 tonnes de matière sèche à l’hectare. L’espérance de vie d’une plantation de saules est de 22 ans, pour une possibilité de sept récoltes. Le recépage s’effectue de façon mécanique avec une faux à recéper. La faux, dont toutes les fonctions sont hydrauliques, s’installe à l’aide d’une attache rapide sur le relevage frontal. Le modèle en démonstration s’opère à l’horizontale, à la verticale ou à l’oblique (0 à 90 degrés). La poutre centrale se glisse, permettant à la faux de se déporter latéralement d’un mètre. Le diamètre maximal des tiges coupées atteint 7,6 cm. Cette barre de coupe sert également à l’entretien de brise-vent et de bandes riveraines.

Déchiqueteur Farmi CH260 – fabriqué en Finlande et distribué par Kverneland

Attelé à la prise de force du tracteur, le Farmi CH260 peut broyer des billes de bois de 25 cm de diamètre. Le déchiqueteur possède un rotor à double disque (1000 tours/minute), et plusieurs grilles de recoupe ou cribles d’affinage permettent de produire des copeaux d’épaisseurs allant de 7 à 25 mm. « Ce modèle déchiquette également divers types de matériaux comme le plastique ou le carton », indique Marie-Pierre Dufresne. Deux rouleaux d’alimentation hydraulique tirent le matériel; l’angle de coupe se trouve à 30 degrés. « Ce modèle compte deux couteaux. En ajoutant un troisième couteau, la coupe devient plus régulière », précise Michel Landry, responsable de comptes chez Kverneland. Un système contrôle la vitesse de rotation du rotor, le no stress control. « On optimise ainsi la performance du broyeur. Lors d’une restriction, on permet au rotor d’atteindre sa vitesse et on obtient des copeaux de tailles uniformes. Avec un tel système, il est possible d’utiliser un tracteur de plus faible puissance », indique Michel Landry. Le déchiqueteur nécessite un tracteur d’une puissance de 80 à 180 HP. Le rendement du déchiqueteur varie de 10 à 40 m3/h.

Biobaler WB-55 – Anderson

La récolte de saules peut s’effectuer de deux façons : en copeaux ou en balles directement au champ. « Les copeaux entreposés en petites quantités ont plutôt tendance à composter. Entreposés en gros tas, ils dégagent suffisamment de chaleur et arrivent à sécher. C’est pourquoi la récolte en balle représente un avantage pour de petits volumes et les circuits courts », explique Yannick Pilon. Avec le Biobaler, la récolte se fait en une seule étape : la coupe et la mise sous balle ronde. Habituellement, la récolte de saules s’effectue au printemps ou à l’automne, lorsque les saules n’ont pas de feuillage. À ce moment, le pourcentage d’humidité du matériel atteint 50 à 55 %, et les balles sèchent ensuite naturellement. En huit semaines, le pourcentage d’humidité baisse jusqu’à 20-25 %. La capacité de récolte atteint 40 à 45 balles à l’heure ou 20 tonnes à l’heure, selon les conditions de récolte. La dimension d’une balle est de 1,2 m x 1,2 m et son poids, de 500 à 600 kg. Un relevage hydraulique permet d’ajuster la hauteur de la coupe. La tête de coupe mesure 2,25 m. Le broyeur à marteaux compte, lui, 50 couteaux, qui tournent à 2000 tours/minute. À noter qu’il fonctionne dans le sens contraire d’un broyeur standard, du bas vers le haut. La récolte au Biobaler nécessite un tracteur d’une puissance de 180 à 225 HP. Biopterre a travaillé de concert avec les deux étudiants de l’Université Laval qui ont adapté le Biobaler à la récolte de saule. « Nous avons fait l’achat du premier Biobaler vendu commercialement au Québec », indique Yannick Pilon. Biopterre offrira ses services pour effectuer de la récolte à forfait.

En milieu naturel, la densité de la biomasse n’est pas constante et les conditions de sol, moins adéquates. L’opérateur doit ainsi rouler moins vite pour un rendement autour de 15 balles à l’heure. En Europe, le marché du Biobaler est plutôt orienté vers les milieux non cultivés, comme pour le nettoyage de lignes électriques. Ce type de travail est donné à forfait par les gouvernements. Pour l’entrepreneur, l’utilisation d’un Biobaler devient avantageuse car, en plus d’être payé pour chaque hectare récolté, il peut tirer un revenu supplémentaire de la vente de biomasse.

Séparateur de balle – Anderson

Le séparateur de balle sert à la fois à la manutention des balles et à les diviser en deux.

Outil d’aide à la décision

Le simulateur économique, un outil d’aide à la décision, s’adresse à tous ceux qui ont des projets d’implantation de haies brise-vent, de bandes riveraines boisées ou de saules. On le trouve dans Internet au http://www.wbevcan.ca/. Le simulateur calcule entre autres tous les frais liés à ce type d’implantation pour en évaluer la rentabilité.