Actualités 28 août 2014

Alarme aux pesticides

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Les produits biologiques ont été largement médiatisés ces derniers jours, mais pour les mauvaises raisons…

À commencer par cette nouvelle de Radio-Canada qui publiait les données de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), comme quoi « près de la moitié des fruits et légumes biologiques analysés depuis deux ans contenaient des traces de pesticides ».

Au Québec, l’histoire a eu l’effet d’une bombe, autant chez les consommateurs que chez les producteurs bio. Certaines personnes arguaient toutefois que les résultats de l’ACIA concernaient plutôt l’ouest du pays, où l’application des normes biologiques s’avère moins rigoureuse à l’intérieur même des provinces.

Sauf qu’en consultant le fameux rapport de l’ACIA, dont la Terre a également obtenu copie grâce à la Loi sur l’accès à l’information, nous constatons qu’un grand nombre d’analyses a été effectué… au Québec!

Des données manquantes

Le rapport nommé A-2013-00155 révèle 807 présences de pesticides dans des aliments certifiés biologiques, et 330 détections de pesticides provenaient du Québec. Certains aliments contenaient plus d’un pesticide. Sur ces 330 analyses, précisons que la majorité provenait de l’importation, puisque seulement 49 étaient de producteurs québécois ou canadiens.

Plusieurs aliments contaminés ne l’étaient qu’à l’état de trace, un résultat vraisemblablement expliqué par une contamination lors de la manipulation ou par la dérive de pesticides provenant des producteurs environnants sous régie conventionnelle. « Les producteurs biologiques n’ont pas de contrôle sur l’air et sur leurs eaux d’irrigation. C’est peut-être un peu utopique, mais si nous voulions diminuer les problèmes de dérives, il faudrait simplement augmenter les superficies en bio! » précisait Jorge Fontecilla, directeur du certificateur Québec Vrai.

Impossible, au moment de mettre cet article en ligne, d’obtenir l’information précisant le pourcentage d’aliments contaminés uniquement à l’état de trace. Toutefois, quatre aliments certifiés biologiques affichaient des concentrations de pesticides suffisamment importantes pour violer la limite spécifiée par la Loi sur les produits antiparasitaires et ses règlements de Santé Canada.

Une gifle pour les organismes de vérification?

Le téléphone n’a pas dérougi chez les certificateurs, de même qu’au Conseil des appellations réservées et des termes valorisants (CARTV).

Cet organisme, « chien de garde » de l’appellation biologique, semble avoir reçu comme une gifle les nombreux reportages pointant indirectement un problème de surveillance des produits biologiques.

« Je ne suis pas contente de la situation, c’est certain, avouait la directrice du CARTV, Anne-Marie Granger Godbout, cet après-midi. Mais j’y vois un côté positif : ça sera l’occasion d’améliorer la communication entre les organismes qui effectuent des tests sur les aliments et ceux qui s’assurent du respect de l’appellation biologique… Aussi, ce battage médiatique aura montré que les aliments sont bel et bien échantillonnés et cela aura peut-être un effet dissuasif chez les entreprises qui voudraient frauder la norme bio. »

Ce n’est pas terminé!

L’industrie du bio n’a peut-être pas dit son dernier mot dans cette histoire. En effet, la situation pourrait prendre un autre sens si l’ACIA rendait public le nom des entreprises qui ont vendu les aliments contaminés tel que listés dans ledit rapport. « Ce serait bien si nous pouvions entreprendre des démarches contre ces compagnies.

Et pour les produits qui affichaient uniquement des traces de pesticides, lesquelles témoignent souvent d’une contamination involontaire, nous pourrions informer les entreprises et ainsi les faire réfléchir à leur problème de contamination », résumait Mme Granger Godbout. Plusieurs questions persistent et l’analyse de ce rapport ne fait que commencer.

Par exemple, ce dernier ne mentionne pas si certains pesticides découverts dans les aliments sont des biopesticides (légaux dans le bio) ou des pesticides de synthèse. Qui sont les producteurs, leurs certificateurs, et quel sera l’impact de cette histoire sur la confiance des consommateurs? À suivre.