Actualités 28 août 2014

Cultiver 120 hectares de jardins

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« En agriculture, il ne faut pas avoir peur, lance en guise d’introduction Gérard Trudeau, président des Fines herbes de chez nous, de Saint-Mathieu-de-Beloeil. Il est possible de prendre sa place, si l’on est innovateur et si l’on construit son entreprise sur les critères les plus sévères de qualité. »

Le producteur maraîcher propose des fines herbes fraîches, 52 semaines par année, à de grandes bannières de l’alimentation comme Sobeys, Loblaw, Metro ainsi qu’à d’importants distributeurs.

Lors du passage de La Terre de chez nous, une armée de travailleurs, la plupart étrangers, s’affairait sur les 210 hectares de terre en culture, dans le poste de conditionnement de la récolte et dans l’usine de transformation où sont préparés les aromates frais en tubes. Après une trentaine d’années de travail dans ce créneau, il ne fait pas de doute que l’entreprise familiale a trouvé sa place dans un marché très compétitif.

Après des études commerciales et une carrière dans la haute fonction publique, M. Trudeau est revenu à la ferme familiale pour lui insuffler une nouvelle orientation. « Je me suis découvert une passion pour les fines herbes lors de mes voyages d’affaires en Europe, où l’on commercialisait des bovins laitiers. C’est quand j’ai vu qu’il s’en produisait en Scandinavie, en zone nordique, que j’ai eu la conviction qu’il serait possible de tenter l’aventure ici, » se remémore l’entrepreneur.

Pour attaquer un marché difficile, M. Trudeau a fourbi deux armes : offrir toute la gamme des fines herbes fraîches de la plus haute qualité, et ce, toute l’année durant. « Dans les années 1980, ce type de produits était peu connu au Québec. Il a fallu mousser la demande en approchant les chefs et les revues spécialisées pour qu’ils proposent d’intégrer ces ingrédients dans leurs recettes, explique-t-il. Ensuite, nous avons trouvé des terres accessibles en République dominicaine, offrant un climat idéal pour compléter l’approvisionnement. » Tout cela semble être de la plus désarmante simplicité, mais le processus a demandé énormément de patience.

Produire sous le soleil

Fin stratège, M. Trudeau savait que cette destination soleil populaire était bien couverte par les vols commerciaux, ouvrant la porte à un transport fiable à ses denrées périssables. Il faut savoir que toutes les herbes commercialisées par la ferme, même celles venant des Grandes Antilles, sont traitées, emballées ou transformées dans ses installations montérégiennes.

Au fil des ans, les relations d’affaires avec la République dominicaine se sont développées de telle façon que le gouvernement local a nommé, par décret, Gérard Trudeau conseiller d’affaires. Derrière cet honneur, le Québécois voit surtout une reconnaissance d’une relation d’affaires gagnant-gagnant. « Notre travail dans ce pays, où je me rends tous les mois depuis 25 ans, a permis à l’agriculture locale de progresser et de se démarquer, » affirme M. Trudeau. Soulignons que Les fines herbes de chez nous emploient une équipe de 160 travailleurs permanents sur l’île d’Hispaniola.

Ici comme au soleil, les fines herbes et les légumes exotiques produits le sont sous régie conventionnelle. Mais les deux agronomes de la ferme ainsi que les trois autres qui œuvrent en République dominicaine veillent à ne donner aux plantes que ce dont elles ont besoin d’engrais et à n’intervenir qu’en cas de nécessité au chapitre des pesticides et des herbicides.

Innover, mais respecter le patrimoine

Après des études supérieures et une brillante carrière, M. Trudeau n’a pas hésité à revenir dans la ferme qui l’a vu naître. « Mon grand-père était producteur laitier, ici, dans le rang qui porte notre nom. Mon père aussi, et il avait touché un peu aux fines herbes. Quand je suis revenu, c’est certain que c’était pour changer la vocation de la ferme. Mais je l’ai toujours fait dans le respect de ce que mes prédécesseurs ont bâti, » témoigne avec sentiment Gérard Trudeau.

À la tête d’une belle entreprise, accompagné par son épouse Françoise et secondé par son fils Vincent, il affirme avec conviction qu’il est possible, en 2014, de vivre de l’agriculture au Québec et de la faire vivre. « C’est difficile, oui, mais nous sommes des survivants, des planificateurs, des innovateurs. Il ne faut pas avoir peur de trouver ses propres solutions, » conclut-il avec passion.